Les troubles politiques en France placent la banque centrale de la Suisse voisine devant un choix difficile. Faut-il baisser les taux d’intérêt pour ralentir la hausse du franc ? Ou la BNS doit-elle continuer à suivre sa propre voie ?
La Suisse est considérée dans le monde financier comme une valeur refuge en ces temps incertains. Cela est dû en partie à la politique prévisible et solide de la Banque centrale suisse. Pour la Banque nationale suisse (BNS) elle-même, l'apparence sûre a été plus un inconvénient qu'un avantage ces dernières semaines. En raison de la perspective d'élections législatives prochainement en France, de nombreux partis choisissent de convertir les euros en francs. La monnaie a augmenté de près de 5 % depuis fin mai. Et la BNS ne l’attend pas avec impatience. Une monnaie chère exerce une pression sur la position concurrentielle internationale de l’industrie nationale. Les entreprises manufacturières représentent un quart de l’économie suisse et la grande majorité des marchandises sont exportées à l’étranger.
Les Suisses ont une longueur d'avance sur la BCE
Après une hausse de près de 20% jusqu’à fin 2023, la BNS a explicitement tenté de faire baisser le franc au cours des six derniers mois. Le mouvement le plus notable s'est produit le premier jour du printemps, lorsque le taux directeur a été réduit de manière inattendue d'un quart de pour cent, à 1,5 %. Pendant longtemps, on a cru que la Banque centrale européenne (BCE) aurait une longueur d'avance sur la Suisse. L'inflation dans la zone euro est légèrement plus élevée qu'en Suisse, mais avec un taux d'intérêt directeur qui se situe à 4,5% depuis l'automne, la BCE a déjà fait tout ce qu'elle pouvait dans le domaine des taux d'intérêt pour garantir que l'inflation soit contenue d'ici au plus tard à la fin de l'année, elle se rapprochera encore une fois de son propre objectif l'année prochaine.
Jeudi est le jour des intérêts
Ces perspectives d'inflation ont incité la BCE à baisser d'un cran son taux directeur début juin. Mais il y a de fortes chances que la BNS prenne une nouvelle mesure demain (20 juin). Ce jour-là, la Banque centrale suisse prendra une autre décision en matière de taux d'intérêt. Il a été récemment annoncé que le gouvernement s'attend à ce que la croissance économique atteigne 1,2 % cette année. Les prévisions d'inflation ont été légèrement abaissées à 1,4 %. Grâce à cette faible inflation, il existe une grande marge de manœuvre pour relancer l’économie grâce à une nouvelle baisse des taux d’intérêt. La forte hausse du franc rend même ce choix un peu plus facile. Le marché des changes intègre désormais 73 % de chances que les taux d’intérêt baissent. Quelques jours plus tôt, ce chiffre n'était que de 50 %.
A contre-courant
En raison de la baisse inattendue des taux d'intérêt en mars et de la récente hausse du taux de change due aux troubles politiques, le franc deviendra l'une des plus grandes surprises monétaires au premier semestre. La BNS aura également un défi majeur à relever : freiner de nouvelles hausses de prix. Si les taux d’intérêt sont effectivement réduits à 1,25 %, il y aura peu de marge pour de nouvelles baisses des taux d’intérêt. Il sera difficile de contrebalancer la BCE, qui réduira encore la marge de manœuvre politique de 4,25% au cours des prochains trimestres. À cela s’ajoute le fait que le franc est très demandé lorsque les tensions politiques montent. Dans l'ensemble, les tentatives de la BNS pour faire baisser le franc donnent l'impression d'aller à contre-courant.
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