Le huard sous pression, mais pour combien de temps ?

Au Canada, le taux d'intérêt directeur sera plus bas demain pour la troisième fois en six mois. Le dollar canadien subit donc des pressions considérables. Mais cela pourrait changer plus tard cette année si d’autres banques centrales emboîtent le pas.

Le dollar canadien a connu de sérieuses difficultés ces derniers temps. Face à l'euro, la monnaie a perdu près de 13 % de sa valeur en deux ans. Initialement, cette baisse ne pouvait être considérée séparément de la baisse des prix du pétrole. À l’été 2022, le baril de pétrole Brent s’échangeait encore à plus de 100 dollars. Aujourd’hui, le même baril rapporte environ 75 dollars. Le Canada est le plus grand exportateur de pétrole au monde après l'Arabie saoudite et la Russie. Lorsque le prix du pétrole baisse, cela a souvent un impact important sur la valeur du dollar canadien. Toutefois, dernièrement, il se passe davantage de choses avec le huard, comme on appelle aussi cette pièce.

L’économie aurait besoin d’un coup de pouce
La banque centrale canadienne est sur le point de réduire son taux directeur de 25 points de base et de donner un peu de répit à l'économie. La baisse des taux d’intérêt rend intéressant pour les entreprises et les consommateurs d’emprunter de l’argent pour des investissements ou des dépenses. L’économie pourrait bénéficier d’un tel coup de pouce. Le chômage est passé de moins de 5 % à l’été 2022 à 6,4 % en juillet. C'est toute une différence avec les États-Unis. Chez son voisin du sud, le chômage se situe à un peu plus de 4 %. Une grande différence est que la Banque du Canada (BdC) dispose d’une plus grande marge de manœuvre pour stimuler l’économie. Le taux d'inflation de 2,5 % se situe dans la fourchette cible de 1 % à 3 %.

La différence de taux d’intérêt se fait sentir
La Banque du Canada utilisait déjà cet espace avec gratitude. Si les taux d’intérêt sont réduits de 0,25 point de pourcentage lors de la réunion politique, ce sera la troisième réduction en six mois. Cela contraste tout à fait avec la Banque centrale européenne (BCE), qui n’a modifié ses taux d’intérêt qu’une seule fois cette année. Aux États-Unis, les marchés financiers attendent depuis des mois la première baisse des taux d’intérêt depuis 2020. La différence se fait clairement sentir sur les marchés des changes. Même si la baisse des prix du pétrole s'atténue nettement, le huard demeure sous pression. La baisse des taux d’intérêt rend de moins en moins intéressant pour les parties de détenir des actifs dans cette monnaie.

Changements de concentration
La poursuite des pressions sur le dollar canadien au cours des prochains mois dépendra en grande partie de la manière dont la Banque du Canada expliquera sa décision sur les taux d'intérêt. Si l’on anticipe une autre série de réductions des taux d’intérêt au cours des prochains trimestres, le huard reculera encore d’un pas. Mais si la banque centrale adopte une position plus prudente, l’attention se porte alors sur la Réserve fédérale et la BCE. En Europe notamment, la banque centrale semble préférer stimuler une économie aux performances modérées plutôt que d’attendre de nouveaux signes de baisse de l’inflation. Il se pourrait donc que les taux d’intérêt sur notre continent suivent ceux du Canada.

Joost Derk

Joost Derks est spécialiste des devises chez iBanPremier. Il a plus de vingt ans d'expérience dans le monde des devises. Cette colonne reflète son opinion personnelle et n'est pas conçue comme un conseil professionnel (d'investissement).

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